Le confinement va t’il tuer la diversité en entreprise?

label diversité

La diversité survivra-t’elle au Covid 19? Un article intelligent de la Lettre de Philonomist n’est pas très rassurant, mais probablement lucide. A vous de lire…

   

L’autre, c’est moi Le retour du tribalisme ?
Chère lectrice, cher lecteur,   Lorsqu’une atmosphère confinée – et donc saturée de gaz imbrûlés – s’enflamme sous l’effet d’un apport d’oxygène extérieur, on parle de « contre-explosion » (« backdraught » en anglais). Le mot me vient spontanément en lisant l’actualité dans le monde, où, à peine sortis de la première phase de la pandémie, les vieilles tensions politiques et sociales reprennent de plus belle. Je pense aux affrontements entre policiers, antifas, et militants d’extrême droite dans les grandes villes occidentales ; mais aussi aux escarmouches à mains nues entre troupes chinoises et indiennes dans l’Himalaya, à l’explosion d’un bureau de liaison dans la zone frontalière entre les deux Corée, à la nouvelle « guerre froide » entre Washington et Pékin, et j’en passe. La période de confinement se termine, voilà qu’on entre dans l’ère du grand pointage de doigts généralisé. Malheureuse coïncidence ? Peut-être pas. Comme le montre la psychologue culturelle Michele Gelfand, face à l’incertitude et au danger – notamment en cas d’épidémie ou de choc environnemental –, les sociétés ont tendance à se resserrer autour de groupes plus restreints, renforçant leurs préjugés. On se retranche parmi ce(eux) qu’on connaît, on s’agrippe à ses certitudes, à ces « valeurs » qui nous définissent, et qui, par contraste, désignent cet « autre » que nous, source de tous les maux… Bref, l’instinct tribal reprend le dessus. 
  « Penser que l’entreprise échappera au phénomène, ce serait supposer qu’elle constitue un monde à part, à l’abri des passions humaines »   Le monde de l’entreprise échappera-t-il au phénomène ? Ce serait supposer qu’il constitue vraiment un « monde » à part, à l’abri des passions humaines… Or, dans nos sociétés imbibées de manichéisme judéo-chrétien, pas même l’auteure – jadis unanimement célébrée ! – de la saga Harry Potter n’échappe au pilori : suite à la polémique autour de ses propos sur la notion de « femme » et l’écriture inclusive, certains employés d’Hachette ont voulu refuser de travailler sur son prochain livre… poussant la direction à défendre la liberté d’expression de son auteure vedette. Mais quid, dès lors, de la cohésion du groupe ? Comment garder une équipe soudée en temps de crise ? Pour ma part, je me contenterai d’évoquer cette leçon de Carl Jung (1875-1961), pour qui notre vision manichéenne du monde vient de ce qu’on ignore notre propre part d’ « ombre » – c’est-à-dire la partie primitive ou pré-morale de notre personnalité, que l’on projette au dehors à défaut de la reconnaître en nous-mêmes. « Lorsque l’individu […] ne devient pas conscient de son opposé intérieur, le monde est forcé de mettre en scène le conflit, en se divisant en deux moitiés opposés » écrit-t-il dans son essai Aïon. Études sur la phénoménologie du soi (1951). L’ombre est « le plus souvent projetée dans des obsessions, des fantasmes […] ou dans l’entourage », dira son élève, Élie G. Humbert. « Elle est “les gens”, auxquels on prête la bêtise, la cruauté, la couardise qu’il serait tragique de se reconnaître. » (L’Homme aux prises avec l’inconscient, 1994). Mais lorsqu’on se réconcilie avec cette noirceur, on apprend à se reconnaître dans l’« ennemi », créant la condition d’une véritable ouverture. C’est dans ce souci d’ouverture que le philosophe Dorian Astor nous parle, cette semaine, de l’importance de mettre ses propres préjugés sur la table, tandis que l’auteur neuro-atypique Josef Schovanec prône une véritable diversité cognitive en entreprise. Enfin, si vous voulez manier le jargon du politiquement correct, ou simplement comprendre les dernières revendications identitaires, nous vous proposons un glossaire des concepts « dernier cri » de l’antiracisme.
Bonne lecture,  Jack Fereday     À lire Pour faire preuve de plus d’ouverture    
La diversité nietzschéenne selon Dorian Astor “Il faut une multiculturalité des entreprises elles-mêmes” En France, les réunions de travail s’éternisent souvent. On demande à chacun son point de vue, et pourtant c’est toujours le sommet de la hiérarchie qui tranche. Comment sortir de cette impasse sans sombrer dans le consensus mou ? Le philosophe Dorian Astor, spécialiste de Nietzsche, préconise d’exposer et confronter réellement la diversité des valeurs et des points de vue – à commencer par ceux des dirigeants eux-mêmes.
     
J. Schovanec invite à inclure toutes les intelligences “Grâce à la différence humaine, les querelles se dissipent” Intégrer une entreprise n’est pas une promenade de santé. Ceux qui ne répondent pas à certains standards ne passent pas l’étape du recrutement – c’est souvent le cas des individus autistes ou « neuro-atypiques ». Pourtant, explique le philosophe Josef Schovanec, militant pour l’inclusion des « intelligences multiples » et lui-même autiste, l’entreprise a tout à gagner à briser les critères arbitraires de sélection et à s’ouvrir à la différence humaine. 
     
“Moi, raciste ?” Petit glossaire pour les débutants en diversité (1/3) Vous pensiez que vous n’étiez pas raciste ? Pas de chance, les exigences ont bien évolué depuis les années où vous brandissiez votre pancarte “Touche pas à mon pote”. Des gestes autrefois anodins sont désormais considérés comme offensants, et de nouveaux concepts, parfois controversés, sont apparus pour désigner des comportements que les militants s’attachent à dénoncer. Nous vous avons préparé un petit glossaire en trois parties des nouvelles notions à maîtriser pour ne pas passer pour un ringard de la diversité au bureau. Commençons par les quatre premiers concepts : altérisation, appropriation culturelle, charge raciale et fétichisation.
        Un autre (télé)travailleur
vous a fait suivre cette newsletter ?   RECEVEZ-LA ÉGALEMENT       Pas encore abonné à Philonomist ?   ABONNEZ-VOUS